Quelques mois de buzz sur les réseaux sociaux avant lancement, une banque conçue dans un esprit startup revendiqué : BNP Paribas a appliqué les nouvelles règles de la banque digitale et annonce cette semaine la sortie de Hello Bank en Belgique et en Allemagne, puis en France en juin et en Italie à l’automne. Une banque 100% numérique et d’abord conçue pour les smartphones. Les clients n’auront pas de conseillers attitrés mais bénéficieront du soutien de conseillers en ligne, mobilisés également sur les réseaux sociaux pour répondre aux questions et avis. L’offre de produits sera délibérément « simple et peu chère », d’après ce qui a été annoncé à la presse.
Bien que plusieurs banques en ligne soient déjà à cheval sur plusieurs pays, la dimension européenne d’Hello Bank est un élément frappant, bien à l’échelle de BNP Paribas, seule banque aujourd’hui dont le marché domestique couvre plusieurs pays européens. Mais, au-delà, quel est l’intérêt d’Hello Bank ?
Les observateurs ont souligné le risque de « cannibalisation » de la clientèle classique, notamment des jeunes, encouru en proposant une offre quasi low cost. Mais pour que cette « cannibalisation » intervienne, il faudrait que la nouvelle formule prenne. Or d’autres observateurs ont justement souligné à cet égard que la clientèle des banques en ligne, plutôt aisée, n’était pas vraiment la bonne cible pour une offre certes commode et peu chère mais très limitée – surtout au moment où les autres banques en ligne renforcent la leur. Cependant, si la gamme d’Hello Bank, doit évoluer, quelle différence y aura-t-il entre cette nouvelle banque et la Net Agence de BNP Paribas ?
Dans une perspective multicanale, Hello Bank trouve sa place : être un canal simple, certes limité en termes d’opérations mais adapté en ceci à l’usage du mobile, auquel il est prioritairement dédié. C’est là une tendance de plus en plus forte aujourd’hui : réserver un canal « mobile first » pour les transactions de base et reporter les opérations plus sophistiquées sur les autres canaux, notamment les agences. Dans une logique multicanale, en effet, les canaux doivent se compléter et non s’exclure.
Or ce n’est pas du tout l’orientation qui a été retenue ! Hello Bank devra vivre à part des réseaux et conquérir de nouveaux clients sous une marque propre. Cependant, l’offre semble alors par trop limitée pour une banque universelle en ligne ; tandis qu’on ne devrait pas pouvoir ouvrir un compte Hello et rester client de la banque traditionnelle. A cet égard, il est difficile de ne pas évoquer les premières initiatives internet des banques au début des années 2000, dont l’isolement par rapport aux réseaux et la position de concurrence face à ces derniers jouèrent beaucoup dans les échecs.
Sans doute la volonté de ménager un « esprit startup » l’a-t-elle emporté et sans doute a-t-on considéré que l’autonomie de la nouvelle banque était indispensable pour entretenir cet esprit. Dès lors, si le succès est au rendez-vous – 1,4 millions de clients sont attendus en 2017, dont 500 000 en France – il sera assez surprenant car ce à quoi nous avons assisté cette semaine était contre toute attente : le leader bancaire européen a choisi de tourner le dos au multicanal !
Guillaume ALMERAS/Score Advisor