La banque polonaise Idea propose, gratuitement, à ses clients entrepreneurs et PME, des outils de gestion de leurs activités sur le cloud. Cette initiative toute nouvelle (développée à partir de 2013 et véritablement lancée en avril dernier) et, à ce stade, assez unique, a tout de suite reçu plusieurs distinctions comme le Disruptive Innovation Award de BAI-Financial Global Banking. Elle le mérite certainement car Idea Cloud annonce la banque de demain, sous un aspect encore mal cerné, particulièrement en France.
La banque de demain, en effet, pourrait bien être un fournisseur de services externalisés pour particuliers et entreprises. Des services ayant rapport avec la gestion de compte et les financements mais bien plus globaux. Pour les particuliers, on peut ainsi trouver des outils de recherche immobilière sur des appli mobiles bancaires. Pour les entreprises, des services de paie ou des plateformes de facturation peuvent également être proposés par des banques. Cela suit la généralisation des outils de PFM (Personal Finance Management) ou de BFM (Business Finance Management), ainsi que des « coffre-fort intelligents » mais les services de ce type restent en général très limités. Et si certaines startups entendent aller beaucoup plus loin en ce domaine, ainsi que de nouveaux acteurs – nous l’avons signalé aussi bien pour Square que pour Intuit – les banques, à quelques exception près, comme Bank of America, n’en font généralement guère un axe fort de développement. La plupart considèrent que ce serait s’éloigner trop loin de leurs métiers. Or c’est peut-être une erreur, aux conséquences, à terme, très dommageables.
Idea Bank propose une plateforme transactionnelle intégrée de management aux petites et moyennes entreprises. Gestion des comptes, paiements, facturation, archivage sécurisé de tout document important, gestion de données des clients et fournisseurs, etc., toutes ces fonctions de base sont accessibles à travers un tableau de bord très commode.
Et Idea Cloud propose encore un service de ramassage de fonds pour les commerçants, la possibilité de disposer de locaux dans les agences – et même de s’y installer à l’extérieur, dans des jardins – ou encore un studio photo pour que les entreprises puissent y réaliser leurs visuels, ce qui est indispensable mais cher. Idea Bank est partie de là : baisser les coûts de gestion des petites entreprises et soulager leurs tâches bureaucratiques, que des enquêtes ont permis d’estimer à 75 mn par jour en moyenne.
La plupart des banques considèrent aujourd’hui que tout ceci n’est pas de leur ressort et les éloignerait de leur core business. Idea Bank a plutôt estimé que ces services sont ce qu’une banque devra désormais apporter, au moins aux entreprises, pour fidéliser ses clients. Car, bien entendu, une plateforme comme Idea Cloud, est un excellent support pour proposer des solutions de financement.
Aujourd’hui, tout le monde parle de centricité client. Idea Bank offre cependant l’un des rares exemples d’un établissement étant allé vraiment au bout de cette logique.
Partir d’une analyse précise des besoins des clients, pour proposer produits et solutions en réponse directe, contextualisée, c’est-à-dire personnalisée. Beaucoup de banques imaginent aujourd’hui que, grâce aux outils de Big Data, l’analyse des comportements de leurs clients va leur permettre de proposer à ces derniers des offres personnalisées. L’exemple d’Idea Cloud invite à considérer que ces offres ne trouveront pas leurs cibles sans une analyse précise des besoins et sans introduire la notion du moindre coût pour les satisfaire. Une telle approche renouvelle complètement les propositions de valeurs bancaires mais combien d’établissements raisonnent aujourd’hui en ces termes ?
Idea Cloud propose à ses clients une solution externalisée et, pour cela, Idea Bank doit elle-même externaliser des compétences, fonctionner avec des partenaires, tant la solution, ne serait-ce qu’au plan informatique, dépasse les outils bancaires courants. C’est là également une dimension encore trop ignorée de l’innovation dans la sphère financière : sa dimension nécessairement partenariale désormais, entre banques et startups notamment.
Enfin, la solution repose finalement entièrement sur l’analyse de flux de données et ne vaut que pour son efficacité et sa pertinence. Ce qui illustre particulièrement que les data sont devenues la matière première des activités bancaires.
Au total, voilà une innovation « boule de neige », qui conduit du e-banking au BFM et au BPO. Une solution intelligente, en ce qu’elle fournit des réponses adaptées à des besoins précisément cernés. On aurait pu attendre qu’elle soit proposée par une startup particulièrement innovante, sur un vaste marché d’amorçage comme les USA. Elle est en fait développée par une banque, en Pologne. Ce qui montre que quand les banques le veulent…
P. ADOUX/ Score Advisor