Il y a deux mois, nous avons signalé le lancement de OneBanks au Royaume-Uni et nous avions promis d’en savoir et d’en dire un peu plus sur cette suggestive et originale initiative écossaise, dont les promoteurs et le fondateur et CEO, Duncan Cockburn, sont visiblement… très malins !
Si vous deviez vous lancer sur le marché bancaire aujourd’hui, que feriez-vous ? Vous vous efforceriez de proposer des offres innovantes, un service très performant, une nouvelle expérience client. Le problème est que tout cela coûte très cher. A faire et à faire connaitre. Vous auriez de nombreux compétiteurs et vous vous heurteriez, du côté du public, à l’inertie des comportements et à une sur-bancarisation qui amène les différentes offres à toutes se confondre.
Et si, avec tout cela, vous deviez en plus vous lancer sans moyens conséquents et sans offres particulièrement innovantes, que feriez-vous ? Vous abandonneriez très vite ! Où bien, vous feriez comme OneBanks.
Les banques passent au digital et ferment leurs agences. Au Royaume-Uni, ces cinq dernières années, plus du tiers ont ainsi été abandonnées. Des territoires entiers sont désormais sans présence bancaire physique ou quasi. Tandis que de 9 à 12 millions de personnes n’accèdent que difficilement à un internet de qualité ou ne l’utilisent qu’avec peine. Enfin, l’usage du cash reste important, surtout pour nombre de commerces et petites entreprises.
Sur ces constats, OneBanks lance des kiosques, servis par deux employés, qui permettent de faire toutes les opérations de base (dépôts, retraits, paiement de factures, virements, … et bientôt dépôts de chèques et transferts). Et ceci, quelle que soit la banque dont on est client. OneBanks propose en effet simplement une appli d’agrégation de comptes qui lui permet en quelque sorte de gérer les comptes des clients à leur place. Et à tous ceux que le digital désoriente ou effraie, OneBanks apporte également un SAV en assistance directe, pour les aider à installer et à utiliser les applis de leur banque. Bref, OneBanks profite de toutes les avancées technologiques pour sauvegarder le contact humain direct, en face à face. Et ceci, de manière multibancaire. A notre connaissance, cette solution est à ce stade unique en son genre.
OneBanks remplit quasiment une mission de service public pour tous les laissés-pour-compte de la digitalisation. Comme la Poste pourrait le faire mais n’en a guère les moyens. De sorte, qu’elle pourrait très bien accueillir les kiosques dans ses locaux. OneBanks envisage même de s’installer dans certaines mairies. Toutefois, en tant qu’agent de service et d’animation local, il séduit en premier lieu les enseignes de la distribution, qui lui assurent ainsi de manière incomparable dès son lancement pas-de-porte et visibilité.
Pour ses clients – car il s’agit bien de cela, OneBanks dispose de son propre KYC – tout est gratuit. Ce sont les banques en effet qui rémunèrent la startup. Trop contentes de pouvoir compter sur celle-ci pour ne pas abandonner complètement leurs clients – ce que les autorités veulent d’ailleurs de plus en plus les contraindre à ne pas faire – tout en pouvant continuer à fermer des agences dont le coût unitaire annuel moyen, au Royaume-Uni, atteint 668 000 £.
Pourtant, OneBanks est à même de développer une relation humaine forte et directe, personnalisée, avec leurs propres clients. La startup se présente comme une sorte de « banque pour les nuls » mais son pari est très ambitieux : capitaliser sur l’humain quand, avec le digital, les banques vont de plus en plus s’anonymiser. Or, si ce pari réussit, OneBanks pourrait bien attirer demain bien plus que les laissés-pour-comptes. Qu’est-ce qui l’empêcherait alors de devenir un comparateur/courtier d’offres financières ? D’ouvrir des comptes ? De proposer des offres originales ? L’exemple, en ce sens, ne peut manquer d’intéresser car il serait appropriable, avec des variations, par d’autres acteurs.
En tous cas, si ce pari réussissait, il représenterait un éclatant pied-de-nez à toutes les stratégies actuelles d’innovation. Les néobanques mettent en avant la technologie. OneBanks s’intéresse surtout à ceux qui se sentent largués face aux technologies (ce qui ne l’empêche cependant pas de très bien maitriser ces dernières). OneBanks sauve tout ce que le digital, apparemment, condamne : le cash, les guichets, l’assistance en face à face. De la crise sanitaire, tout le monde retient qu’elle accélère les services à distance, le sans-contact. OneBanks en tire surtout que de plus en plus de gens, isolés et fragilisés, ont de plus en plus besoin d’une assistance de proximité.
Et, du même mouvement, OneBanks défend l’inclusion financière pour gagner les clients des banques. En comptant que toute cette dimension humaine qu’elles sont en train de perdre, les banques vont payer OneBanks pour la recueillir ! Des malins, on vous dit.
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