Pour contenir la propagation du covid-19 à l’intérieur et autour de la province d’Hubei, les autorités chinoises ont recours à de nouveaux outils de surveillance (drones, adaptation de la télésurveillance – largement déployée dans les villes – pour fonctionner malgré les masques de protection, …) et elles ont particulièrement choisi d’utiliser les deux applis mobiles Alipay (Ant Financial/Alibaba) et WeChat (Tencent), devenues les premiers canaux de paiement nationaux.
D’abord testé dans la ville de Hangzhou, à partir du 11 février dernier, l’Alipay Health Code est en voie de généralisation à l’ensemble du pays et a également été développé de manière similaire sur WeChat. L’appli délivre trois QR-Codes : vert (accès libre), jaune (l’utilisateur est soumis à une quarantaine préventive de 7 jours) et vert (la quarantaine est de 14 jours).
Sachant que les services publics et commerces de tous types filtrent l’accès du public en fonction de ces trois codes, chacun a intérêt à s’y inscrire. Sont alors demandées des données médicales, de localisation ainsi qu’un historique des contacts et des déplacements récents. Les codes sont actualisés tous les jours à minuit.
Les critères de calcul des trois codes n’ont pas été rendus publics et il semble très difficile de changer un code une fois attribué, même au vu de données qui le contredisent. Aucune date de fin d’utilisation de ce système n’a été annoncée. Et, selon le New York Times, les données permettant de localiser les utilisateurs sont communiquées à la police qui peut ainsi, en temps réel, modifier les couleurs (notamment pour mettre en quarantaine les individus venant d’un nouveau foyer de contamination qui se déclarerait). A cet effet, pour faciliter leur localisation et suivre leurs déplacements, les utilisateurs doivent notamment scanner les numéros d’identification des différents moyens de transport qu’ils utilisent.
Dans le contexte présent, les autorités chinoises se sont largement appuyées sur les compétences dont peuvent disposer Tencent et Alibaba – lequel aurait mis par ailleurs au point un algorithme d’analyse d’images de scanner, fiable à 96%, permettant la détection de contaminations en 20 secondes (contre 5 à 15 mn d’examen des mêmes images par un médecin). Pour le reste, face aux critiques que le dispositif de QR-Code a pu susciter, Ant Financial a fait savoir qu’il ne faisait que mettre à disposition ses services aux autorités et qu’il n’avait pas accès aux données collectées.
Et si c’était effectivement le cas ? Il y bien entendu deux manières de considérer ce dispositif. On peut y voir une mesure drastique et martiale mais sans doute assez efficace prise par un pouvoir fort pour endiguer une pandémie. Sans plus. On peut également noter qu’elle s’ajoute à d’autres dispositifs de contrôle des populations et notamment une vidéo-surveillance omniprésente et un score de crédit décidant pour chacun de ses fréquentations, comme de l’accès aussi bien aux emplois qu’aux agences matrimoniales. Avec le système de QR-Codes, il devient en plus possible aux autorités de restreindre, quasiment en temps réel, l’accès à des lieux et donc les déplacements.
Quelle interprétation faut-il retenir ? Nous laisserons se prononcer à cet égard des observateurs plus compétents que nous. Nous nous contenterons de noter que si, en Chine, les géants de l’internet ont pu en quelques années s’emparer des paiements et des crédits (à travers leur scoring), mettant ainsi les banques sur la touche, cela s’est fait – pour le moins – sous le regard favorable des autorités. C’est là un scénario d’évolution qui n’est jamais envisagé en Occident. Il est vrai que tout ce qui se passe en Chine est si lointain…
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