Ce que l’on nomme la «Silver Economy» correspond à la rencontre de deux phénomènes :
- Un vieillissement global de la population.
- Qui va particulièrement peser sur la consommation, car les séniors sont en moyenne plus aisés que les autres classes d’âge
En France, dès aujourd’hui, les plus de 50 ans ont des revenus supérieurs de 30% à la moyenne. Or le nombre des séniors augmente. Dès demain, ils représenteront donc le segment de marché le plus intéressant. Ils deviendront le cœur de cible de nombreux secteurs – notamment la banque.
Or ce changement – le vieillissement (appelons les choses par leur nom) de leur cœur de cible – ne sera sans doute pas facilement reçu : les marques visent plus naturellement les jeunes et craignent de se ringardiser en ciblant les séniors. On peut pourtant se demander si les banques en lignes, plutôt que cibler les « bobos » jusqu’à la caricature…
… ne devraient pas s’essayer davantage à séduire les séniors – comme certaines d’ailleurs ont commencé à le faire :
Les séniors, après tout, possèdent 75% des portefeuilles boursiers et il serait ridicule de considérer que les 50-70 ans souffrent d’un quelconque retard pénalisant en matière d’internet. Ce sont eux qui ont fait le succès des tablettes et le segment des utilisateurs de Twitter qui augmente le plus rapidement concerne actuellement les 55/64 ans.
Mieux vaut en fait se convaincre qu’il n’y a pas de marché des séniors. Parce qu’on ne peut aborder de la même manière un cadre de 55 ans au sommet de sa carrière et un retraité de 83 ans qui commence à se soucier de son autonomie. Parce que l’âge ne permet plus de prédire le comportement des silver surfers, les enfants du Baby-boom. Et surtout, parce que les séniors ne se voient pas comme tels – ils ne se sentent pas vieux !
Il n’y a pas un marché des séniors mais des consommateurs qui, de manière générale, gagnent en maturité. C’est sous cette perspective que les 50 ans + peuvent être abordés de la manière la plus efficace aujourd’hui et cela invite simplement à épouser leurs valeurs ; lesquelles sont néanmoins nettement distinctes de celles que les entreprises retiennent encore en majorité et qui visent plus volontiers les plus jeunes. En ce sens, il faut se préparer à une Silver Revolution. Les consommateurs les plus intéressants, dès demain, auront en effet pour beaucoup d’entre eux été élevés dans le rejet de la société de consommation ! Dès lors, des marchés de consommation gagnant en maturité, cela voudra dire :
- des consommateurs moins immédiatement sensibles aux modes
- moins fidèles aux marques que leurs parents et moins « accros » que leurs enfants
- plus de recul face à l’utilité réelle des biens et des services et donc une attitude plus regardante face à leurs prix.
- Plus de demande d’un choix réel, ce qui signifie : plus de conseils qualifiés et moins de références
- Un souci de durabilité, de traçabilité
- Une demande de commodité, d’employabilité immédiate de la part de la génération qui a fait Apple et ses objets sans mode d’emploi – mais qui ne veut surtout pas d’objets outrageusement simplifiés pour les malhabiles (mobiles à grosses touches, par exemple)
- Une attente quant à la reconnaissance de leur fidélité
- Une demande de sens : consommer plus en fonction de valeurs que de modes
Les « jeunes séniors » (moins de 75 ans) iront sans doute vers de telles valeurs beaucoup plus que vers des offres qu’on dessinera spécifiquement pour eux. Et si ces valeurs s’imposent, ce pourrait bien être une véritable petite révolution par rapport à ce qui prévaut actuellement, sous différents aspects (principes de tarification, promotion des offres, mise en marché, …). Cela se traduira concrètement d’abord par l’inefficacité d’un marketing orienté produits, qui est encore largement celui que déploient les banques et qui, lorsqu’il vise les séniors, aboutit quasi-inévitablement à penser des produits peu ou prou médicalisés (autonomie, assistance, …), qui évoquent, quoi qu’on fasse, la maison de retraite ! La Silver Economy oblige à appréhender une vaste clientèle qui ne se distingue plus par ses besoins mais par sa maturité.
Guillaume ALMERAS/Score Advisor