Nous nous en apercevons souvent à travers nos activités : beaucoup de banques françaises ne sont pas très à l’aise avec les persona. Ces personnages imaginaires représentant des clients cibles qu’utilise désormais communément le marketing. Nombre de banques hésitent encore à en employer ou ne les emploient que de manière très limitée. Et bien d’autres ne savent trop qu’en faire, une fois qu’elles les ont élaborés. Le problème est général en fait et loin de se limiter à la France (voir ainsi cet article de The Financial Brand). Par ailleurs, il est essentiel et va bien au-delà d’une question de méthodologie marketing. En revanche, il semble particulièrement concerner les banques et les compagnies d’assurances, dans la mesure où, plus que d’autres secteurs, elles s’adressent à tout le monde et développent des offres et des outils censé satisfaire un client « moyen ». Qui n’existe plus !
Longtemps, la segmentation clientèle des banques a été assez sommaire. Et nous avons connu encore assez récemment des établissements où elle se limitait toujours pratiquement à des caractères démographiques ou de taille pour les entreprises. Sont ensuite apparus les sociotypes (souvent déterminés sur la base des niveaux de patrimoine ou de revenus), puis les persona. Ce sont des représentations fictives d’individus concrets, incluant des éléments psychologiques, qui synthétisent et rendent saillantes les caractéristiques propres à un type de client que l’on estime être une cible intéressante.
Bien entendu, beaucoup de questions méthodologiques se posent concernant la confection et la pertinence de ces persona. Mais il faut, avant tout, s’interroger sur la démarche elle-même qui, dans la plupart des cas, revient à distinguer des cibles commerciales parmi la clientèle existante. Laquelle est donc toujours vue à travers un client moyen – cet elastic user, comme le nommait Alan Cooper, qui fut le premier promoteur des persona marketing – plutôt que comme constituée de groupes de clients nettement distincts dans leurs profils, comme dans leurs attentes et besoins. Posant la question de savoir comment on s’adresse à une clientèle plurielle.
Ainsi, à une communication institutionnelle visant le public en général, on superpose, pour toucher les persona, une communication davantage ciblée mais qui utilise les mêmes moyens de masse (emails, sms, etc.). Lesquels sont devenus largement inefficaces dans un monde digital qui les multiplie jusqu’au pilonnage !
En revanche, si l’on s’efforce de définir des persona non plus au sein des clients existants mais du public en général, la perspective devient sensiblement différente. C’est que le public n’est plus alors pris globalement.
Pour chaque type de persona, il faut se demander quelle image il a de l’établissement. S’il est susceptible de trouver, parmi les personnels, des profils qui lui ressemblent. Quels événements particuliers sont à même de lui faire rechercher une nouvelle banque. Autant de questions aux réponses distinctes selon les cibles, voire opposées dans certains cas. Autant de questions auxquelles, selon nos constats, peu de banques sont capables de répondre de manière précise par rapport à des publics ciblés, au-delà de segments de clientèles définis par des critères trop vagues tels que la classe d’âge (Millenials, etc.).
Or si l’on s’adresse à des publics nettement différenciés, la communication doit changer et privilégier certains aspects relevant d’un inbound marketing, paraissant moins importants dans le cadre d’une communication institutionnelle générale : personnalité différentiante de l’établissement, relais d’interaction et de mise en valeur des expertises avec des non-clients, influenceurs (y compris au sein des personnels et des clients existants), spécialisation de certains canaux de distribution, … Finalement, cela conduit également à envisager d’un œil neuf le développement des offres, des outils et des applis.
En somme, les persona doivent permettre de repérer à quoi ressemblent dès aujourd’hui les profils émergents susceptibles d’être des cibles à 5 ou 10 ans, en se demandant en quoi un établissement est ou doit devenir capable de les séduire plus que d’autres. C’est certainement l’une des principales clés de la banque de demain. Toutefois, les établissements financiers engagés dans une telle approche sont encore peu nombreux.
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