Si un homme conseillait aux femmes « en cas de mariages ou de pacs, essayez de passer un peu plus de temps à comprendre les différents régimes [matrimoniaux] qu’à choisir le traiteur », on y verrait l’expression d’un sexisme crasse et éculé. Mais c’est une femme qui le conseille aux femmes, avec l’ambition de les aider à lever le dernier tabou : l’argent.
Dans son livre Le couple et l’argent. Pourquoi les hommes sont plus riches que les femmes (Paris, L’Iconoclaste, 2022), Titiou Lecoq enjoint aux femmes de prendre le pouvoir sur leur argent.
C’est que, voyez-vous, pour l’autrice, les Françaises de 2023 vivent dans une quasi servitude, les rapports hommes/femmes doivent être envisagés comme un combat et le couple comme un affrontement. Une prise de conscience parait donc aussi nécessaire que salutaire car, au fil des pages, les Françaises semblent d’une étonnante immaturité. Au point qu’il faut aller jusqu’à leur dire : « Sur vos relevés bancaires, y a-t-il des dépenses que vous ne comprenez pas ? Le cas échéant, cherchez-en l’explication. » (nous n’inventons rien : p. 279).
Tout ceci, cependant, n’est pas notre sujet mais plutôt les recommandations qui sont données en matière de gestion financière.
Elles sont peu nombreuses mais assez significatives. On recommande Bankin’, parce qu’on reçoit tous les matins un email avec le solde de ses comptes (consulter son appli bancaire est sans doute trop compliqué !) et également des messages en cas de grosses dépenses ou entrées. Pour les dépenses communes, on utilisera Tricount, une appli de partage ponctuel de dépenses, ce qui peut paraitre un peu bizarre pour les dépenses d’un couple.
On recommande également un compte commun pour les dépenses courantes en couple et un autre « pour le remboursement du crédit » car cela permet de visualiser qui a payé quoi (!). Autre bizarrerie, telle qu’énoncé : constituer un compte d’épargne à son nom et non pas à celui de ses enfants.
De manière générale, pour l’éducation financière (on voit que l’on part de très bas), sont recommandés des sites pour femmes : Mon budget Bento et Plan Cash, ainsi que Oseille & Compagnie. Mais aucun média financier en particulier (les articles spécialisés sur la finance sont-ils inaccessibles aux femmes !?) et c’est ce qui est sans doute le plus intéressant.
L’ouvrage fournit ainsi en effet l’exemple d’un phénomène qui est en train de devenir assez général. Le rapport à l’argent a de plus en plus recours à une couche d’intermédiation affinitaire (on trouverait des exemples tout à fait similaires pour les Z), plutôt qu’il ne s’adresse directement aux banques. Il y a là quelque chose que les banques sont en train de perdre. Ce qui dans le cas présent parait assez étonnant quand on sait que les chargés de clientèle des banques françaises sont majoritairement… des femmes.