Francisco Gonzalez, Chairman de BBVA, n’a pas hésité à l’annoncer récemment : à l’avenir, BBVA deviendra une software company. Selon lui, en effet, la transformation digitale qui frappe l’essentiel des activités bancaires ne laisse pas de choix : les expertises en matière de design et de développement applicatif vont devenir des compétences clés pour les banques. De fait, bien que cela apparaisse encore très peu en France, on voit d’ores et déjà de plus en plus d’établissements internaliser de telles compétences par acquisitions.
PayPal vient ainsi d’acquérir Modest, une plateforme de commerce contextuel sur mobile, qui permettra aux entreprises clientes de s’y déployer. Capital One, l’une des banques les plus résolument engagées dans cette voie, a successivement acquis Level Money (un outil de PFM), Bundle (analyses de données de paiement) et surtout Monsoon et Adaptive Path, des startups de design et de développement d’apps. A elles non seulement de développer, désormais sous l’égide du grand établissement américain, ce qui sera le fer de lance de son offre à l’égard des particuliers et des entreprises mais surtout de provoquer, en son sein, un changement culturel.
Un scénario de mutation, lié à la transformation digitale, se dessine ainsi pour l’ensemble de l’industrie bancaire : le changement de l’intérieur, après absorption de jeunes pousses. Une régénération en quelque sorte, correspondant au fait que les banques gardent largement les moyens d’acquérir leurs nouvelles rivales à la recherche de fonds – lesquels ne pourront justement que manquer à beaucoup d’entre elles pour concurrencer les banques, sur un marché où les innovations prennent souvent une génération pour être adoptées massivement.
Pour Francisco Gonzalez, il n’y a pas d’alternative. C’est la seule solution pour que les banques réussissent leur transformation digitale et relèvent ainsi le défi que leur posent désormais à la fois startups fintech et grands de l’internet. De fait, même si peu d’établissements au total sont encore véritablement engagés dans une telle transformation, on peut facilement prédire que l’approche va se généraliser.
Pour autant, ce scénario permettra-t-il aux banques de s’immuniser contre cette nouvelle concurrence extérieure ? Notre précédent billet souligne quelques fausses pistes en matière de transformation digitale. Pour que les banques parviennent à fonctionner à l’instar de software companies, de profonds changements devront intervenir – car même chez les établissements les plus en pointe à cet égard, comme BBVA, justement, il est à craindre que certains réflexes aient la vie dure. Francisco Gonzalez annonce ainsi qu’aujourd’hui 3 000 personnes seulement chez BBVA, sur 110 000, travaillent à la transformation digitale. Il prédit que la moitié du staff sera concerné, cependant, d’ici cinq ans. D’ores et déjà, il annonce que 450 personnes travaillent sur le BBVA Wallet.
Pardon ? 450 personnes pour un Wallet ?! Il y a déjà pas mal d’années, Fred Brooks n’a-t-il pas montré que plus il y a de personnes sur un projet informatique, plus celui-ci devient lourd à gérer et prend du retard (The Mythical-Man Month: essays on software engineering, 1975) ?
T. Lowry/Score Advisor