Alors que l’entrée d’Amazon dans le domaine bancaire se précise, les articles et les commentaires s’accumulent. Pourtant, assez étrangement, certaines évidences manquent d’être soulignées.
Pour la plupart des observateurs, l’arrivée d’Amazon ne fait que concrétiser la menace que les GAFA sont à même de représenter pour les banques – une menace qu’on ne cesse de ressasser depuis des années et qui repose essentiellement, à lire les articles qui lui sont consacrés, sur la capacité des grands de l’internet à rassembler et à séduire, à travers des solutions commodes et innovantes, un très grand nombre de personnes. On prête ainsi aux GAFA une force d’attraction, assise sur de larges capacités financières, face auxquelles les banques ne pourront que difficilement riposter. Or cela, qui est incontestable sans doute, n’est pourtant pas l’essentiel.
Un intéressant article de The Financial Brand va plus loin. Il souligne les caractères particuliers de l’expérience client qu’offre Amazon et invite les banques à rapidement s’en inspirer (Three customer experience lessons from Amazon). De quoi s’agit-il ? De la personnalisation des interactions avec la plateforme (le « one-click » et les autres dispositions), le suivi des (très nombreux) abandons en ligne, l’amélioration constante de l’expérience client multicanale. Autant de dimensions vis-à-vis desquelles les banques semblent à la traîne et qui soulignent également les spécificités fortes d’Amazon – plateforme généraliste de commerce en ligne – par rapport à Google, Facebook et même Apple, avec lesquels il est trompeur de la confondre (en revanche, le rapprochement avec Alibaba, comme l’ont compris un certain nombre d’observateurs, parait bien plus pertinent).
Cependant, quoique fort intéressants, ces points sont-ils les plus décisifs quant à la vraie menace qu’Amazon représente pour les banques ? Une autre menace, bien plus importante, est mentionnée au début de l’article : Amazon rassemble de plus en plus de vendeurs, dans tous les domaines et propose ainsi des offres de plus en plus intéressantes à ses clients.
C’est là le point essentiel : les clients d’Amazon ont aujourd’hui intérêt à ce qu’Amazon se développe ! Quel client de banque peut en dire autant ? En achetant via Amazon, je participe au développement d’une plateforme qui élargit constamment ses offres et permet ainsi de trouver des prix toujours plus intéressants. Il y a là une dynamique commerciale forte qui reproduit en ligne l’attrait qu’exercèrent les grandes surfaces dans le commerce physique au cours des Trente glorieuses. Une dynamique qui sera difficile à contrer si elle réussit à inclure les produits financiers. Car qui a vraiment l’impression que sa banque lui propose de plus en plus de choses pour des tarifs de moins en moins chers ? Qui a vraiment l’impression de gagner à être client de telle banque ? C’est bien la question qu’il faudrait poser. Ce n’est pas que les banques ne proposent rien. Au contraire. C’est qu’il manque une dynamique. Dans le cas précis des banques, des programmes de fidélité, intelligemment développés, pourraient y contribuer. Mais peu de banques s’y intéressent. Faute d’avoir bien identifié la menace ?
Guillaume ALMERAS/Score Advisor