Il n’a jamais manqué d’intermédiaires boursiers ni de sites de trading. Mais aujourd’hui, de nombreuses banques se demandent si elles doivent intégrer ces services, d’une manière ou d’une autre, à leurs offres courantes. Où en sommes-nous ?
Comme cela est désormais bien connu, le secteur du trading a connu une vraie révolution depuis une dizaine d’années.
Cela tint d’abord à l’apparition de courtiers numériques, dont le principal est bien entendu l’américain Robinhood (apparu en 2013). D’emblée, celui-ci a proposé ou a standardisé des normes qui sont aujourd’hui devenues très courantes : pas de frais de courtage (Robinhood se rémunère sur l’apport à des Money makers des fonds qui transitent par son site), pas de montant minimum d’investissement (on peut commencer avec 1$), l’achat d’actions par fractions, …
Péjorativement, Warren Buffet a jugé que Robinhood n’était qu’un casino. Or c’était assez juste ! Il s’agissait pour le nouveau courtier en ligne, accessible sur mobile, de rendre l’investissement facile et immédiat (en fournissant notamment le moins d’informations possibles), complet (les cryptos ont été introduites en 2018) et excitant, avec des récompenses (actions gratuites, parrainages) et des alertes permanentes, incitant à revenir souvent sur l’application.
Aujourd’hui, les choses ont un peu évolué. Très critiqué pour son manque d’information, notamment à l’occasion du suicide en juin 2020 d’un jeune client qui avait mal compris ce qui arrivait à son portefeuille, Robinhood propose davantage de formations et d’initiation. Il vient de lancer un média (Sherwood Media), en complément de sa newsletter Snacks (qui compterait 32 millions d’abonnés dans le monde !). Par ailleurs, il propose une formule d’abonnement (Gold).
Mais, pour l’essentiel, Robinhood poursuit son objectif de démocratisation du trading. Car, dans le contexte de la crise sanitaire et de ses confinements, Robinhood est devenu énorme. Il gagne 3 millions de nouveaux clients au cours des quatre premiers mois de 2020 et atteint rapidement plus de 20 millions d’utilisateurs mensuels alors que la bourse et les marchés des cryptos s’enflamment. Beaucoup de clients investissent ainsi pour la première fois et beaucoup sont très jeunes. Aux Etats-Unis, on les nomme justement les « Robinhoods ». Ils portent certaines valeurs au pinacle (Tesla) et sont à même d’inverser certaines vagues baissières. Ils recyclent en large partie les chèques à la relance versés par le Gouvernement américain. Mais le phénomène est mondial.
Aujourd’hui, l’engouement est retombé. Mais les plus jeunes générations Z et Y semblent durablement et bien davantage que leurs ainés intéressés par les marchés financiers. Les sites de courtages en ligne n’ont jamais été aussi nombreux et ils ciblent une population jeune, ayant peu de moyens. Sans surprise, on trouve ainsi :
- Des sites spécialisés dans les micro-investissements : Plum, Stockpile (pour que parents et enfants investissent ensemble), Acorns (qui place la petite monnaie), …
- Des sites de découverte : Stash, Staax (qui se présente comme un jeu et qui permet d’offrir des actions en cadeaux), … Le gaming et l’apprentissage du trading sont souvent conjugués : Bux (on commence en virtuel et l’on peut passer au réel), Investr, …
D’une manière ou d’une autre, tous ces sites ont voulu profiter de la vague Robinhood, tout en insistant sur un accompagnement didactique que l’on estime manquer de manière cruciale à Robinhood. Sous ce registre un certain nombre de banques se sont également lancées, en insistant sur la dimension de conseil : CommSec de la CommBank australienne (qui a également lancé CommSec Learn), Merrill Edge avec Idea Builder ou encore Belfius avec Re=bel (avec une dimension RSE).
A ce stade, ces différentes initiatives n’ont pas vraiment rencontré un succès correspondant aux attentes. Réciproquement, les sites de courtage qui l’ont tenté n’ont pas vraiment réussi à proposer des services financiers plus classiques à leurs utilisateurs (Robinhood a voulu lancer un service Checkings & Savings ; il s’est contenté de proposer une Cash Card).
De là, beaucoup considèrent désormais que l’engouement pour le trading, très lié aux conditions de la crise sanitaire, n’aura été qu’un épiphénomène.
Mais c’est peut-être ne pas comprendre ce qu’il s’est réellement passé.
L’intérêt des jeunes générations ne semble pas être retombé, surtout dès lors que dans un pays comme la France un phénomène nouveau vient d’apparaitre : les plus jeunes commencent à épargner pour leur retraite.
Toutefois, on ne peut en attendre un engouement soutenu. Comme le montrent les sites de trading social, souvent anciens (eToro), l’intérêt connait des cycles. A l’affut d’opportunités, il nait en réseau (sur TikTok, Instagram, …), se nourrit de conseils de proche en proche qui créent parfois des vagues.
Robinhood, ainsi, n’a pas converti les jeunes au trading – on l’a bien vu avec l’affaire GameStop, née non pas à travers Robinhood mais sur le forum WallStreeBets de Reddit.
Robinhood a simplement fourni l’accès le plus commode aux marchés financiers à de jeunes générations souvent naïves, certes, dans leur poursuite d’un enrichissement facile et immédiat mais dont l’approche est résolument DIY – ce qui se marque par une rémunération assez faible par client (137 $ chez Robinhood) et la difficulté à drainer ces clients vers d’autres services financiers, qu’ils ne sont pas venus chercher –pas davantage que des conseils didactiques ou des cours de trading.
A ce compte, Robinhood a bien renouvelé le public du trading, avec un client moyen qui a 31 ans, contre 50 dans une vénérable institution de Wall Street comme Charles Schwab (lequel multiplie néanmoins les efforts pour rajeunir sa clientèle). Mais le segment de ceux que le trading intéresse vraiment n’a sans doute pas été très élargi. Tandis que beaucoup tiennent cependant désormais à pouvoir, au besoin, bénéficier de services simples et quasi-gratuits leur permettant d’accéder aux services financiers – ce qui correspond assez à ce qu’en France propose Lydia.
Mais le meilleur exemple est sans doute celui de Boursorama, qui ouvrirait depuis le début de l’année 500 comptes de bourse par jour. Le fait que Boursorama offre un accès facilité et bien complet aux marchés financiers (Boursomarkets) est sans doute un argument fort pour beaucoup parmi celles et ceux qui choisissent Boursorama comme banque. Et on sait qu’ils sont de plus en plus nombreux.