Tout va bien ! C’est en tous cas ce que l’on peut lire sur le site d’actualités de Boursorama : « En dix ans, le pouvoir d’achat immobilier des Français a augmenté de 40% en moyenne, selon une étude de Meilleurtaux.com. » Nous vivons donc dans un monde formidable où la baisse des taux d’intérêt nous permet de nous loger mieux que jamais. A moins qu’il n’y ait un loup quelque part…
Avec la baisse des taux, nous explique l’article, le coût des crédits immobiliers a été divisé par cinq en dix ans. Le taux à 20 ans était de 5% en 2009. Il est de 1,4% aujourd’hui. Donc, si l’on prend pour base une mensualité de crédit de 1 650 € et compte tenu de l’évolution des prix de l’immobilier sur la période, cela permet d’acquérir 75 m2 de plus à Saint-Etienne et au Mans, 45 m2 au Havre ou à Toulon et de 28 à 34 m2 supplémentaires à Grenoble, Reims, Dijon ou Angers.
Certes, ce n’est pas le cas à Bordeaux, où du fait de l’augmentation des prix immobiliers, on a perdu 25 m2 en 10 ans. A Lyon, ce sont 15 m2. Et à Paris, 4 m2. Mais au total, si les emprunteurs sont perdants dans 5 grandes villes, ils sont gagnants dans 15 autres, est-il indiqué.
Corrigeons cette affirmation en considérant le tableau ci-dessous, qui reprend les villes citées et qui indique clairement que les emprunteurs sont perdants partout où ils voudraient aller et gagnants partout où la demande est faible (nettement inférieure à l’accroissement total de la population française) ou dans des villes qui perdent des habitants. Dans l’ensemble, Paris est tout à fait à part : la demande est forte mais les prix y sont tels que l’accroissement de population y est très limité.
Si l’on ajoute à cela que, malgré la baisse des taux, le nombre de foyers emprunteurs pour leur résidence principale n’a pratiquement pas augmenté sur dix ans (23,2% en 2009 et 23,6% en 2018, selon L’Observatoire des crédits aux ménages), force est de reconnaître que la baisse des taux, loin d’avoir augmenté le pouvoir d’achat immobilier des Français, l’a plutôt restreint, puisqu’elle a fait flamber les prix des villes où ils veulent le plus se loger et leur en a rendu l’accès plus difficile. Mais on lira encore probablement nombre d’articles qui tenteront de nous convaincre du contraire. A travers eux, on dirait un peu entendre les discours que tiennent ceux qui, victimes d’une addiction, tentent de se convaincre qu’ils ne courent aucun risque !
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